
Jeudi 24 juillet 2025, la cathédrale Notre-Dame de Paris a retrouvé les seize grandes statues ornant la base de sa flèche. Ici, la statue de l'apôtre saint Thomas avant sa repose. Photo : Romaric Toussaint © Rebâtir Notre-Dame de Paris.
Commencée il y a un peu plus d’un mois, la repose des 16 statues de la flèche de Notre-Dame de Paris s’est achevée ce jeudi 24 juillet. Imaginées par Eugène Viollet-le-Duc, lui-même, au XIXe siècle, ces sculptures monumentales ont été entièrement restaurées.
La dernière des seize grandes statues de la flèche de Notre-Dame de Paris a rejoint aujourd’hui son lieu-dit. Ouverte avec le « levage » de l’effigie de saint Paul, l’opération s’est terminée par la réinstallation de celle de saint Thomas, qui venait donc compléter l’ensemble des sculptures imaginées par Eugène Viollet-le-Duc au XIXe siècle, à savoir les douze apôtres et les symboles des quatre évangélistes (le lion, le taureau, l’ange et l’aigle). Toutes avaient échappé de justesse à l’incendie. Elles reprennent aujourd’hui leurs places, intégralement restaurées et consolidées pour mieux résister aux affres du temps et de la météo.
Des statues bientôt visibles pour les visiteurs
La fin des travaux de couverture est prévue dans les prochains jours. Les échafaudages de la flèche, qui cachent actuellement les statues, seront progressivement retirés à partir de la semaine prochaine. Les visiteurs devront attendre ainsi jusqu’à la fin du mois d’août avant de pouvoir admirer de leurs propres yeux les statues. Pour Philippe Jost, président de l’établissement public Rebâtir Notre-Dame de Paris : « la pose de la dernière statue marque l’aboutissement d’un travail exceptionnel qui restitue à la flèche de la cathédrale, chef-d’œuvre d’Eugène Viollet-le-Duc, toute sa grâce et sa beauté.”
24 juillet 2025, lors de la repose de la statue de l’apôtre saint Thomas sur la base de la flèche de Notre-Dame de Paris. De gauche à droite : Virgine Valenza, architecte du patrimoine, Marie-Hélène Didier, conservatrice générale du patrimoine et conservatrice des monuments historiques à la Drac Île-de-France, Philippe Jost, président de l’établissement public Rebâtir Notre-Dame de Paris, Rémi Fromont, architecte en chef des monuments historiques, Didier Cuiset et Johan Noblet, respectivement directeur et chef de chantier (Europe Echafaudage) et Vincent Combe, chef de projet (UTB) entourant la statue de saint Thomas. Photo: Romaric Toussaint © Rebâtir Notre-Dame de Paris.
Sauvées in extremis des flammes et entièrement restaurées
Les seize statues de la flèche avaient été déposées quatre jours avant le terrible incendie du 15 avril 2019 qui a ravagé la cathédrale et les aurait probablement définitivement fait disparaître. En effet, à la suite d’un diagnostic de Philippe Villeneuve, architecte en chef des Monuments historiques, elles avaient bénéficié d’une levée de fonds (environ 1,4 million d’euros), à l’initiative de la Fondation Notre-Dame et de Friends of Notre-Dame, pour être restaurées chez Socra à Périgueux entre 2019 et 2021. Transportées dans berceaux de bois réalisés sur mesure, les statues ont donc été restaurées afin de « retrouver leur couleur d’origine au moment de leur pose », selon la Direction régionale des Affaires culturelles d’Île-de-France (DRAC) qui a suivi le projet.
Les statues de la flèche de Notre-Dame de Paris avant leur restauration. Photo : © Wikimedia Commons / Priscille Leroy
Les restaurateurs ont ainsi redonné aux statues la couleur brune originelle de leur patine, car elles avaient pris avec le temps une teinte vert-de-gris. Pour ce faire, les spécialités se sont appuyées sur les dessins d’Eugène Viollet-le-Duc, qui a restauré Notre-Dame de 1843 à 1864, les archives du sculpteur attitré de l’architecte, Adolphe Geoffroy-Dechaume, ainsi que les photographies prises par Séraphin-Médéric Mieusement et Charles Marville peu de temps après l’installation des sculptures sur la cathédrale.
La statue de saint Thomas, dont le visage a les traits d’Eugène Viollet-le-Duc. Photo: Romaric Toussaint © Rebâtir Notre-Dame de Paris
Un choix symbolique
À partir de septembre 2020, les seize statues restaurées ont progressivement rejoint la Cité de l’architecture et du patrimoine, dans le XVIe arrondissement de Paris, pour y être exposées entre février 2023 et avril 2025. Elles ont ensuite rejoint la « base vie » du chantier, au chevet de Notre-Dame, pour être minutieusement préparées au « levage » jusqu’en juin dernier. Ces œuvres monumentales pèsent chacune près de 140 kg et mesurent jusqu’à 3,40 mètres de haut, ce qui justifie sans peine que Philippe Jost ait qualifié la réussite de l’opération de véritable « exploit ».
La statue de saint Thomas avant sa repose sur la flèche, entourée de deux couvreurs ornemanistes. Photo: Romaric Toussaint © Rebâtir Notre-Dame de Paris.
Le choix de saint Thomas pour clôturer la repose n’est probablement pas anodin. En effet, Eugène Viollet-le-Duc s’est inspiré de sa propre figure pour dessiner son visage. Initiateur du projet qui a permis la création de ces statues au milieu du XIXe siècle, il clôt symboliquement un long processus de restauration, à l’issue duquel ces œuvres entament une seconde vie.